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marine le pen - Page 3

  • Lettre ouverte à Monsieur Claude Guéant

    Monsieur le ministre

    Dois-je vous féliciter? Pour votre première grande interview politique, vous avez frappé fort. Dans l'entretien que vous avez accordé au journal Le Monde (édition du 16 mars), vous avez incontestablement le sens des forclaude-gueant.jpgmules et des propos coup de poing. Témoin ce passage « Les Français ont le sentiment que les flux non-maîtrisés changent leur environnement. Il ne sont pas xénophobes. Cela étant, ils veulent que la France reste la France. Ils veulent que leur mode de vie soit respecté, que la laïcité demeure à la base de notre pacte républicain. […] Les Français veulent que les nouveaux arrivés adoptent le mode de vie qui est le leur. »

    Sur le coup, en lisant ces phrases, je me suis demandé si vous n'aviez pas ramassé dans votre boîte aux lettres un tract du Front national et si vous ne vous étiez pas emmêlé un peu les pinceaux. Mais non, me suis-je dit, ce n'est pas possible de la part d'un haut-fonctionnaire formé dans le moule républicain et exercé aux plus hautes fonctions...

    Pour redevenir sérieux, je ne comprends pas très bien votre propos. « Les Français ne sont pas xénophobes. Cela étant... » Toutes les enquêtes d'opinion montrent une plus grande tolérance vis-à-vis des propositions excluantes portées depuis une bonne vingtaine d'années par le parti de la famille Le Pen. N'y aurait-il pas là un zeste de xénophobie qui signifie, sauf erreur de ma part, peur de l'étranger? Il me semble qu'un ministre de la République, laquelle s'appuie sur la Déclaration des droits de l'homme qui proclame que « les hommes naissent libres et égaux en droits », devrait dénoncer cette montée des peurs en direction des étrangers et non balayer d'un revers de la main une réalité que tous les observateurs sérieux notent : pour diverses raisons qu'il serait trop long d'expliquer ici, une frange de plus en plus large de la communauté nationale considère que la venue des étrangers est porteuse de périls et qu'il convient de s'en protéger. Comment comptez-vous endiguer cette montée de réactions xénophobes (appelons un chat un chat) qui fragilisent notre « vivre ensemble »? J'ai cherché réponse à ma question dans l'entretien. Je n'ai rien lu, si ce n'est un laconique « Le volet intégration de ce ministère doit être renforcé ». Quelles actions concrètes? Avec quels moyens? Quels éléments de mesure des progrès de l'intégration? Mystère et boule de gomme. Réponse dans une prochaine interview au Monde?

    En revanche, vous êtes plus loquace sur ce que pensent les Français. « Les Français ont le sentiment », « les Français veulent », etc. Vous voilà donc porte-parole auto-proclamé des  Français. Et si dans quelques années, « ils » veulent que l'on remette les immigrés à la mer, comme l'a suggéré finement une parlementaire de votre parti, appliquerez-vous la « solution » puisque « les Français » le veulent? Avec des raisonnements comme le vôtre, on aurait jamais légalisé l'IVG ni aboli la peine de mort. Passons...

    Le coeur de votre propos est dans le titre que Le Monde a justement retenu : « Les Français veulent que la France reste la France. » Là encore, j'ai du mal à comprendre – ou alors je comprends trop bien. La France a toujours été une terre d'immigration, donc elle n'est jamais restée la même tout en étant fidèle à sa tradition d'accueil. J'ai le sentiment que c'est vous, ministre de la République, qui ne souhaitez pas que la France reste fidèle à sa tradition. En l'occurrence, je me sens plus fidèle à la France éternelle, celle qui s'est enrichie depuis des siècles au contact des immigrés. Au début du XXe siècle, les Français auraient également pu vouloir que « la France reste la France » et n'accueille pas les Italiens, les Polonais qui frappaient à sa porte. Fallait-il les rejeter au motif qu'ils risquaient de changer notre mode de vie?

    Vous voulez que les flux migratoires soient maîtrisés. Très bien, mais comment fait-on quand on fuit la misère ou l'oppression? Pensez-vous qu'on va gentiment déposer une demande d'immigration dans nos ambassades et attendre tranquillement la réponse des autorités françaises? En général, on prend ses jambes à son cou pour sauver sa vie et/ou l'avenir de ses enfants. Fallait-il aussi que la France se ferme aux Hongrois qui fuyaient la répression communiste en 1956 (vous pouvez en parler avec l'homme politique que vous servez depuis des années)? Et les Vietnamiens et les Cambodgiens qui prenaient la mer dans les années 70, fallait-il leur demander d'aller voir ailleurs car il ne fallait surtout pas que notre gastronomie et nos modes de vie soient perturbés?

    Vous voyez, la France, cela ne peut se résumer à des slogans électoralistes tout faits qui n'ont aucune portée sur les réalités (ou alors il faut tourner le dos à notre cadre républicain). Il n'est même sûr que l'ambition électoraliste qui vous anime – arrêter l'exode d'électeurs UMP vers Marine Le Pen – soit satisfaite par ce genre de déclaration. En tout cas, cela nous ferait presque regretter les outrances verbales, condamnées par la justice, de votre prédécesseur qui n'aimait pas trop les... Auvergnats.

    Pour redevenir sérieux et pour conclure, si votre objectif est de lutter contre la progression du FN, je ne vous conseille pas de tenter d'en proposer une version soft mais de vous attaquer aux questions qui sont au coeur de cette désespérance politique: la montée du chômage et de la précarité, le dénigrement de la fonction publique et plus généralement de tous ceux qui œuvrent, par exemple dans les associations, à créer du lien social. Vous et l'équipe gouvernementale devriez également vous attaquer aux injustices et aux ghettos de pauvres comme de riches qui favorisent la montée des peurs. C'est cette forme de communautarisme qui menace le plus notre pacte républicain, davantage que quelques prières dans la rue de musulmans faute de lieu de culte décent.

    En résumé, vous devriez refaire de la politique dans son sens le plus noble, servir l'idéal de « liberté, égalité, fraternité » au lieu de courir après un démon qui sera toujours plus rapide et habile que vous.

    J'espère, Monsieur le ministre, qu'après un bizutage un peu inquiétant pour nos valeurs, vous vous ressaisirez et redeviendrez digne de la République qui vous a confié ses pouvoirs.

  • DSK: pourquoi tant d'emballement?

    Alors que le monde est suspendu à la situation dramatique en Libye et la fuite en avant du dictateur Kadhafi - ami du ministre Ollier et admiré, entre autres, par le nouvel ambassadeur français à TDSK, Marine Le Pen, JL Mélenchon, médiasunis-, alors que le monde arabe vit une mutation sans précédent, voilà que nos médias français (franchouillards, oserais-je écrire) se passionne pour un non-événement: la venue à Paris pour une réunion financière du directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn. Bien entendu, tout le monde guettait un signe tangible de son intérêt pour 2012, tout en sachant bien que sa position internationale ne lui permettait pas de prendre position. Cela d'ailleurs lui aurait été reproché car, au vu de la situation tendue sur les marchés (notamment ceux des matières premières), une option de DSK sur la présidentielle aurait pu encore plus compliquer la situation internationale. N'oublions pas que l'onde de choc dans le monde arabe est lourde de conséquences pour le pétrole. Un renchérissement brutal des cours de l'or noir aurait raison de la timide reprise économique dans le monde occidental et on peut comprendre que le patron du FMI ait d'autres soucis que la présidentielle française (même il doit y penser de temps en temps, pas simplement en se rasant...).

    Et voilà que nos bons médias s'emballent, jaugent une déclaration de sa femme sur son blog (qu'elle tient depuis belle lurette) et spéculent déjà sur un duel Sarkozy-DSK. Cette façon de précipiter l'agenda et de dicter aux Français le duel auquel tout le monde (dans les grands médias) rêvent ne peut qu'accroître les fractures dans l'opinion publique. Mais pensez donc, un tel duel serait si alléchant. Deux fauves de la politique face à face, chacun ayant côtoyé les grands de ce monde, chacun ayant construit de solides réseaux dans les milieux politiques, patronaux et médiatiques. Comme on prête à Sarko comme à DSK des casseroles (sans qu'on sache si elles seraient d'ordre personnel ou financier) qui pourraient sortir à cette occasion, les « observateurs » de la vie politique voient dans ce duel tous les ingrédients réunis d'une pièce à rebondissements.

    Et le débat politique dans tout ça? Il a été encore une fois oublié. Comme l'a dit avec justesse François Hollande, c'est le directeur général du FMI qui s'est exprimé, pas le candidat putatif à la présidentielle. Qu'il se soit permis d'égratigner indirectement la gestion Sarkozy ne prouve rien, si ce n'est que DSK n'a pas oublié qu'il appartenait à la gauche française.

    Fin d'un épisode (sans grand intérêt). Mais réfléchissons à ce que cette spectacularisation de la vie politique pourrait amener. La classe politique subit dans l'opinion un discrédit très fort. En tout cas, celle qui passe l'essentiel de son temps dans les palais parisiens de la République. Le tableau est connu et nul ne peut le contester. Les médias souffrent eux aussi d'un manque de crédibilité qui n'est pour rien dans la crise économique que traverse la presse écrite. Outre quelques ratés mémorables, on leur reproche d'être trop proches des puissants et de se désintéresser du quotidien des Français. Malheureusement, tout n'est pas faux dans ce tableau, même si le discours conspirationniste (voir des complots partout) qui l'entoure souvent est totalement réducteur.

    Dans ce tableau sombre, la tentation des médias à vouloir annoncer un duel DSK/Sarkozy est non seulement risquée (on devrait se rappeller comment Balladur en 1995 puis Jospin en 2002, chouchous des médias, ont été éliminés dès le premier tour), mais dangereuse. Elle fait le lit du discours protestataire qui monte un peu partout dans la société. Celui-ci a beau jeu de comparer la fortune de DSK (d'autant que ses émoluments faramineux de DG du FMI ne sont pas soumis à l'impôt) au goût prononcé de l'argent de notre Président. En gros, l'héritier contre le nouveau riche. Cette thématique risque de ne pas servir celui qu'on veut lancer dans l'arène, DSK, mais d'alimenter le discours de Marine Le Pen (et accessoirement celui de Jean-Luc Mélenchon). Celle-ci atteindrait déjà 20% d'intentions de vote dans un récent sondage et ses marges de progression sont réelles. La candidature sous la bannière FN aux cantonales d'un syndicaliste de la CGT, ancien militant de l'extrême gauche, témoigne, même si le cas reste encore isolé, d'un attrait pour le discours plus social et ultra-laïque de la fille Le Pen (lire mon post du 13 décembre).

    Vouloir discréditer l'éventuelle candidature de DSK au nom de sa fortune revient non seulement à donner du crédit aux thèses de l'extrême droite, mais à tuer le débat politique. On ne peut pas démolir un politique sur ce que sa naissance – ou son mariage – lui a donné. La critique doit porter sur la cohérence de son parcours (avec une question que j'ai du mal à trancher: peut-on avoir une gestion plus à gauche du FMI?) et surtout sur ses propositions. S'il s'avérait que le candidat des socialistes (en supposant que la primaire d'octobre le désigne) faisait preuve de frilosité dans l'indispensable lutte contre les inégalités et dans la redistribution des richesses, on pourrait alors se demander s'il est toujours de gauche et si sa fréquentation de la haute finance internationale (qu'il a habilement critiquée sur France2) n'a pas déteint sur ses convictions. Mais à l'heure d'aujourd'hui, tout procès d'intention à l'égard de DSK est déplacé. Il sert plus le FN que l'UMP, empêtré dans ses contradictions et ses ratages diplomatiques en rafale.

  • Une menace nommée Marine

    Elle monte, elle monte. Où s'arrêtera-t-elle? Marine Le Pen, la (probable) future présidente du Front national, eMarine_Le_Pen.jpgst l'étoile montante de la politique française. Elle affole les instituts de sondage, s'en prend aux musulmans, provoque une tempête médiatico-politique en comparant les prières musulmanes dans la rue à l'Occupation. Alors que le gouvernement peine à répondre aux attentes d'un pays fébrile, alors que le PS commence à replonger dans les délices de la guerre des ego (lire le post du 30 novembre), la fille Le Pen donne, qu'on le veuille ou non, un souffle nouveau. Bien entendu, elle n'est pas l'hirondelle qui annonce le renouveau de la démocratie car, qu'elle le veuille ou non, elle est en phase avec la tradition xénophobe et populiste de l'extrême droite. Simplement, elle renouvelle profondément la façon de se présenter aux citoyens et élargit la thématique du FN. De quoi séduire un nouvel électorat, plus jeune, plus féminin, moins idéologue, désorienté par le naufrage du sarkozysme et l'ankylose de la gauche.

    Le 6 décembre, sur France 2, dans l'émission d'Arlette Chabot, elle a crevé l'écran. Face dati.jpgà une Rachida Dati, timorée et peu convaincante dans son éloge de la politique du président de la République, elle incarnait une voie populaire décomplexée. L'enfant de l'immigration maghrébine apparaissait, avec son apparence stricte et ses lèvres rouge vif, comme la représentante de l'establishment alors que la fille du tribun richissime de l'extrême droite, peu maquillée et souriante, faisait fille du peuple, cool comme on dit aujourd'hui. La télé fabrique de l'image et cette inversion des symboles entre « Rachida » et « Marine » est absolument terrible car elle est porteuse d'un brouillage de repères dans un monde qui en manque déjà cruellement.

    L'attraction pour Marine Le Pen n'est pas qu'une question d'image ; elle s'explique aussi par un élargissement des thématiques. Elle rompt, d'une certaine manière, avec les tabous de son père. Lequel s'en prenait avec véhémence à l'oligarchie économique (sous-entendu juive et franc-maçonne) mais se gardait de soutenir toute revendication sociale. Venu à la politique par le poujadisme, il était résolument dans le camp des petits entrepreneurs, des commerçants et des artisans qui dénonce le matraquage fiscal de l'Etat et le poids des syndicats, de la CGT en premier lieu. Sa fille a compris que dans une société où le salariat est largement dominant, l'accession au pouvoir n'est pas possible en se mettant à dos la grosse majorité de celui-ci. Voilà pourquoi elle s'est prononcée contre la réforme des retraites mise en œuvre par le gouvernement, la jugeant injuste. "Mais, vous avez un discours de gauche", s'est exclamé Arlette Chabot. Justement, son pari est de troubler la ligne de partage droite-gauche pour rassembler tous les déçus des deux camps.

    Voilà pourquoi elle défend avec vigueur une sortie de la France de la zone euro. Ce dernier point devrait permettre au FN d'engranger de nouveaux soutiens en raison d'une situation économique dégradée et qui échappe, semble-t-il, aux dirigeants de ladite zone. Qu'observe, en effet, l'électeur lambda? Au printemps, il constate que la Grèce est en situation de cessation de paiements et soumise à un remède de cheval. Il peut se dire que ces Grecs n'ont pas été très sérieux avec leurs finances, tout méditerranéens qu'ils sont. Et puis, il entend le discours rassurant des grands de ce monde selon lequel l'incendie est maîtrisé. Six mois plus tard, l'Irlande, ce dragon celtique aux taux de croissance insolents, est dans une situation voisine. Là encore, même remède, même méthode Coué, mais l'opinion publique n'y croit plus. Elle pense qu'on lui ment, que sont inscrits sur la liste les prochaines victimes de la zone euro, l'Espagne, le Portugal et qui sait la France.

    Dans ce contexte, il est tentant de penser que c'était bien mieux avant, qu'avec notre franc, au moins, on maîtrisait les choses et qu'on pouvait dévaluer quand bon nous semblait. Les choses sont évidemment plus compliquées, mais comme elles le sont, un discours simpliste a toutes les chances d'être entendu. En face, les défenseurs du maintien dans la zone euro sont à la peine car ils savent que la situation monétaire est instable, que l'Union européenne manque d'une vraie coordination et que d'autres pays pourraient souffrir de l'orthodoxie libérale. C'est quand le politique est nu, que les outils politiques sont totalement insuffisants ou inopérants pour réguler un tant soi peu la machine économique que les discours populistes de tout poil séduisent.

    Il ne faut pas demander à Marine Le Pen de renier son fonds de commerce familial; il faut demander à la classe politique républicaine de retrouver un discours crédible et une action cohérente avec celui-ci. Sinon, le porte-drapeau de l'extrême droite new look pourrait sérieusement troubler le jeu en 2012 en arrivant à la troisième place, voire à la seconde.

  • Cela va (vraiment) mal finir...

    Il règne une drôle d'ambiance dans ce pays. Quand je dis « drôle », je devrais plutôt dire bizarre ou écœurante. Sur le plan politique, le pouvoir remet chaque semaine une louche de rigueur alors qu'il jurait, au moment des régionales, qu'il n'y aurait pas de plan de réduction des dépenses. Personne ne le croyait alors, mais pourquoi ne faudrait-il plus croire la parole des autorités? D'ailleurs, à quoi bon appeler « autorités » des instances qui n'ont plus aucune crédibilité? Ces derniers jours, on a même vu le pouvoir s'interroger sur la réalité de l'augmentGuéant.jpgation des rémunérations des fonctionnaires prévue ce 1er juillet. Juste avant les vacances, il faut le faire! Et puis, on a pu lire dans un journal anglais que le secrétaire général de l'Elysée promettait pour l'automne de nouvelles coupes dans les budgets publics. Qui est-il, ce Monsieur Guéant, l'homme des basses œuvres sarkozystes et des relations aussi étroites que nauséabondes avec quelques dictateurs africains (qui ont eu la peau de Jean-Marie Bockel à la Coopération), pour faire ce type d'annonce? N'existe-t-il pas dans ce pays un Premier ministre et un ministre de l'Economie et des Finances? Pourquoi un tel mépris pour les autorités légitimes? A ce compte-là, puisqu'il faut faire des économies, pourquoi ne pas supprimer, après la Garden Party de l'Elysée, Matignon et quelques autres ministères?

    Parlons-en, d'ailleurs, des maroquins ministériels. Certains d'entre eux,Christian blanc.jpg sans doute peu harassés de travail, se comportent comme des gougnafiers. Prenons l'exemple de Christian Blanc qui s'est fait pincer par Le Canard enchaîné avec une facture de 12000 euros de cigares pris en charge par le Trésor public. 12000 euros, Monsieur Blanc, c'est à peu près ce que gagne un Smicard sur une année! Ils sont des millions à se contenter de ce que vous fumez en une année... Le comble dans l'affaire, c'est que notre fumeur de havanes aux frais de la princesse désargentée, non seulement ne présente pas sa démission (ce qui se passe fréquemment chez nos voisins, et pour des sommes souvent moindres), mais qu'il charge un ancien de ses collaborateurs coupable, selon lui, de la fuite vers la presse.

    Cela rappelle furieusement la situation du week-end dans l'équipe de France de foot où les joueurs firent la grève d'un entraînement, non pour dénoncer les propos inqualifiables d'un de ses membres en direction du sélectionneur (certes médiocre, mais ce n'est tout de même pas lui qui est en charge de marquer des buts), mais pour le soutenir ou faire semblant. La seule obsession de cette clique de bras cassés aux salaires ahurissants était de savoir qui avait révélé les propos de ce joueur particulièrement mal élevé qui avait conduit à son exclusion. Dans ce pays, ce qui est grave n'est pas d'avoir des pratiques illégales ou des paroles injurieuses, mais de révéler des faits. Le comble est que le Premier des Français reçoive, dès sa sortie d'avion, l'un des joueurs de cette Thierry Henry.jpgpitoyable équipe - par ailleurs remplaçant de luxe d'un prestigieux club espagnol - qui, à en croire la presse, serait l'un des meneurs de la grève de l'entraînement. Que cette rencontre ait lieu le jour d'une grande grève nationale (grève signifie perte de salaire pour ceux qui ne sont pas milliardaires du foot) ne semble pas choquer le Château.

    La dimension affaire d'Etat prise par l'élimination de l'équipe de France, le choix d'un interlocuteur discutable (est-ce le responsable de la main qualificative des Bleus, le meneur de la fronde, le plus « capé » des Bleus qui est reçu?) par « l'autorité » publique qui prétend s'immiscer dans les affaires internes d'une fédération sportive pourtant autonome dans sa gestion, le mépris affiché en direction de centaines de milliers de citoyens qui craignent pour leur retraite... tout cela donne le vertige ou la nausée. On aimerait que quelques consciences nationales ou quelques éditorialistes courageux s'élèvent contre l'indignité nationale de cette nouvelle religion d'Etat qui en arrive à éclipser tout le reste. Ce 24 juin, par exemple, l'Elysée a annulé une rencontre avec des ONG pour parler du G20 et de la situation des pays pauvres... Sans importance tout cela au regard de l'avenir du coq français!

    Cerise sur le gâteau, pourrait-on dire, on apprenait ces jours-ci le limogeage sans trop d'égards de deux humoristes qui intervenaient le matin sur France Inter. On peut aimer ou non leur humour (moi, j'aimais plutôt et je ne suis pas prêt d'oublierGuillon.jpg le sketch hilarant de Stéphane Guillon sur la venue de DSK), mais on ne peut que s'inquiéter des choix idéologiques des patrons du service public de la radio. Trouver scandaleux tel ou tel sketch, c'est par définition refuser le statut d'humoriste qui forcément franchit régulièrement la ligne jaune érigée par les censeurs. S'il ne provoquait pas la réaction des « grands » ou supposés tels de ce monde médiatique, il raterait son objectif. S'il n'était plus un poil à gratter, parfois mal élevé, inconvenant ou grossier, il ne serait plus digne du nom de bouffon.

    Dans unLéotard bis.jpg livre écrit voici près de deux ans, François Léotard prophétisait un « ça va mal finir », en décryptant l'évolution du régime politique incarné par Nicolas Sarkozy pour lequel il avait voté. Celui qui n'avait pas toujours été un politique bien inspiré (souvenons-nous de la privatisation de TF1) trouvait des mots justes pour décrire cette dégradation générale du climat, cette banalisation de tout (de la fonction présidentielle, de l'honneur, du rapport éthique avec les deniers publics...). Il annonçait le règne des fausses valeurs et de la médiocrité ambiante. Nous y voilà donc. Et si l'on ajoute les conséquences d'une grave crise économique – dont les plus faibles vont payer le plus lourd tribut -, il faut vraiment s'inquiéter de la situation française. Sans vouloir jouer aux oiseaux de mauvais augure, rappelons tout de même que les fascismes européens sont toujours nés de la conjonction d'une décadence morale des « autorités », d'un sentiment d'humiliation nationale et d'une paupérisation des couches laborieuses. En tout cas, dans ce marais nauséabond, il est une responsable politique qui doit se frotter les mains. Elle porte le patronyme de Le Pen et le prénom de Marine...